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Gilles Laurent a 34 ans, il est né à Strasbourg où il vit actuellement. Il est devenu schizophrène à la suite d’un environnement professionnel stressant. Il a accepté de témoigner afin de changer le regard du grand public sur cette maladie. Interview réalisée par Théophile Mercier, journaliste.

  • Quels sont les premiers signes et qu'est-ce qui vous a convaincu que vous étiez schizophrène ?

Au départ, la schizophrénie est un délire de persécution. Souvent les gens pensent que c’est un dédoublement de la personnalité mais ce n’est pas du tout ça. Chez moi, c’était vraiment un sentiment d’être surveillé et écouté en permanence. J'avais l'impression qu'il y avait des caméras partout et que les gens que je rencontrais avaient des écouteurs et étaient là pour m'écouter. Progressivement, j'ai eu des hallucinations auditives. J'entendais des voix. Je pensais que c'était la réalité, je cherchais quelque chose de rationnel en pensant que quelqu'un avait caché des micros et des émetteurs dans ma veste, dans les murs de mon appartement. La crise est venue progressivement. Au bout de cinq nuits sans dormir, je me suis rendu aux urgences en leur demandant de regarder s'il n’y avait pas un micro-émetteur dans mes oreilles.

Et en ce qui vous concerne, cet état est survenu à la suite de conditions de travail particulières ?

Pour moi oui, car c’était un travail où il fallait gérer pas mal d’informations en même temps. Il y avait pas mal de stress.

  • Aviez-vous des antécédents familiaux liés à cette maladie ?

J’ai demandé à mon oncle et à ma mère, mais a priori non, même si j’ai lu sur internet qu’il pouvait y avoir un terrain héréditaire. Mais probablement que j’avais une fragilité quelque part. Alors c’est sûr, en remontant dans la lignée familiale, on peut sûrement trouver quelque chose mais, pour ma part, je n’en sais rien.

  • Saviez-vous ce qu'était la schizophrénie avant ?

Non du tout, je ne m’y étais d’ailleurs jamais intéressé. Et forcément, lorsqu’il nous arrive ce genre de chose, on se met à faire des recherches. J’ai cherché sur internet des vidéos de professeurs qui expliquaient la maladie. Et la manière dont ils la décrivaient correspondait parfaitement à mes symptômes. Les psychiatres savent très bien expliquer ce qu’est une crise de schizophrénie.

  • Vous pensiez avoir une autre maladie ?

Au départ, je ne pensais pas avoir une maladie mentale. Je pensais juste être persécuté. Lorsqu’on m’a interné en psychiatrie, on m’a donné un premier traitement appelé Xeroquel pendant quinze jours mais il a moyennement fonctionné et j’avais l’impression qu’on voulait me faire passer pour un schizophrène mais pas que je l'étais.

  • Que s’est-il passé après votre première hospitalisation ?

Lorsque je suis sorti au bout de quinze jours, vu que j’étais persuadé de ne pas être malade, j’ai arrêté le traitement d’autant plus que j'avais des effets secondaires avec le Xeroquel. Trois semaines après, mon délire de persécution était de retour. Je suis donc retourné en psychiatrie. Ils m'ont donné un autre traitement, le Risperdal qui est très efficace sur moi. C'est à ce moment-là que je me suis rendu compte qu'avec ce traitement, je n'entendais plus les voix et que j'avais vraiment cette maladie. J'ai un peu paniqué.

  • Avez-vous eu des effets secondaires ?

Oui, avec le Xeroquel, j'étais vaseux toute la journée, un peu le même état que lorsqu'on se réveille après 1h de sieste. Avec le Risperdal, j’avais la marche maladive lorsque je prenais plus de 4mg, l'envie de marcher en permanence. J’avais du mal à rester en place. Mais au fur et à mesure, les médecins ont décidé de diminuer puis d’arrêter le traitement pour voir comment j’allais réagir. Et pour l’instant, ça se passe bien. On m’a juste conseillé d’éviter les environnements trop stressants et surtout de ne pas prendre de drogues.

Comment avez-vous vécu votre passage en hôpital psychiatrique ?



  • Est-ce que vous vous sentez guéri ?

On n’est jamais vraiment guéri. Peut-être qu'un jour je referai une crise car c'est une maladie chronique. Pour le moment, je ne travaille pas mais si je dois reprendre un travail à plein temps, peut-être faudrait-il que je reprenne un traitement.

  • Comment se passe votre vie de tous les jours ?

Parfois, quand je me promène en ville et que j'entends des gens rigoler entre eux au loin, j'ai le sentiment qu'ils se moquent de moi alors qu'il n'y a aucune raison puisque je ne les connais pas. J'avais déjà ce sentiment avant d'avoir cette grosse crise. Je pense que c'est une sensation liée aux prémices de cette maladie. Je ne me sens désormais plus surveillé et écouté. J'ai repris une vie normale.

  • Avec le recul, pensez-vous que vous auriez pu avoir des signes d’alertes ?

Non, car je n’ai pas le sentiment d’avoir vécu ce genre de choses avant. C’était vraiment lié à un changement professionnel.

  • Avez-vous bénéficié de soutien de la part de votre entourage ?

La première fois, j’ai pris la décision d’aller à l’hôpital de moi-même. Mais la seconde fois, c’est mon colocataire qui s’est aperçu que je ne disais pas des choses cohérentes. Il a donc pris la décision d’appeler les secours.


Gilles estime qu'à l’annonce de la maladie, il a développé une forme de déni. Pour ses proches, dont sa mère, ça n’a pas été facile. Il explique pourquoi :



 

Comment le diagnostic vous a-t-il été annoncé ?



 

Pourquoi avoir accepté de témoigner ?

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