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Cadre de haut-niveau de 55 ans, Alessia relate la très mauvaise expérience qu’elle a eue avec des psychiatres en ville, à l’hôpital et dans un centre expert fondaMental. Elle raconte comment trois psychiatres l’ont déclarée schizophrène par erreur et ont gâché trois ans de sa vie.


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Comment tout cela a-t-il commencé ?

Je vais tout d’abord mettre un peu de contexte et parler un peu de moi : J’ai 55 ans, suis cadre supérieure dans une grande entreprise.

Durant mon adolescence, j’ai fait une anorexie sévère non soignée, dont je me suis sortie seule, avec l’aide d’une psychologue. J’ai par ailleurs toujours été une enfant puis une adulte angoissée. Donc je me suis fait aider très tôt et pendant longtemps par des psychologues. Mais jamais, je n’ai eu d’hallucinations ! Je suis par ailleurs une personne très structurée. Mes parcours scolaire et professionnel en attestent.

J’ai fait des études supérieures solides (grande école) et j’ai toujours été bien insérée professionnellement. Curieuse et très active, j’ai beaucoup voyagé partout dans le monde pour mon plaisir mais aussi pour des raisons professionnelles. Et puis je suis une intellectuelle, une créative par l’écriture ou la peinture. Je lis énormément et je tiens un blog. Je suis plutôt solitaire, j’ai peu d’amis mais ce sont des vrais amis, sur qui je peux compter !


Quand est survenue votre première hospitalisation ?

Ma première hospitalisation dans un service psychiatrique remonte à 1997. J’étais à l’époque en conflit avec mon employeur et j’étais très angoissée par la situation. Je prenais des anxiolytiques. Mon compagnon d’alors s’absentant une semaine à l’étranger, nous avons préféré que je sois accompagnée et prise en charge dans un hôpital pendant sa courte absence. De fait, je suis restée une semaine à l’hôpital et j’ai eu droit à un traitement dont j’ai complètement oublié la teneur... Il m’a mise KO pendant sept jours.

En 2007, j’ai eu une première dépression, qui était un énorme burn out. J’ai été soignée uniquement avec des antidépresseurs par un psychiatre de ville, à Paris. Je n’ai pas été hospitalisée. Ce psychiatre a été à mon écoute et j’ai eu affaire à un grand professionnel.

Cela a été long puisque j’ai été arrêtée quasiment un an et j’ai repris mon travail progressivement en 2008. La dépression s’est envolée, le psychiatre a arrêté les médicaments. J’ai également cessé de le voir pour démarrer une psychanalyse chez un spécialiste jusqu’à début 2014.


Que s’est-il alors passé ?

Des signes de dépression ont alors réapparu. Le psychologue ne savait pas les gérer... et m’a avoué être dépassé !

Je n’ai pas osé aller revoir le psychiatre qui m’avait soigné en 2007. Sur les conseils d’une amie, je suis allée voir un autre psychiatre de ville en mars 2014 qui m’a prescrit des antidépresseurs. Il en a essayé de nombreux et, comme il ne constatait aucune amélioration, et que j’avais de plus en plus de difficultés à travailler, il m’a suggéré de me faire hospitaliser à l’hôpital sainte Anne, qu’il connaissait bien.

Je suis donc rentrée mi-juillet 2014 à sainte Anne (de mon plein gré), au CMME, dans l’unité des troubles de l’humeur.

Et c’est là que tout s’est compliqué !


Comment cela ?

J’étais certes très bien installée dans une chambre spacieuse et individuelle. Là-dessus, rien à redire.

Un premier entretien s’est déroulé avec quatre ou cinq personnes : le chef de service, deux psychiatres, un interne, un ou deux stagiaires : deux médecins posaient des questions, un ou deux notaient tout ce que je disais et l’un m’observait !

Les médecins ont instauré immédiatement un nouveau traitement avec un nouvel antidépresseur, et ils ont ajouté un neuroleptique. Je me suis étonnée de la mise en place d’un neuroleptique. Les médecins m’ont répondu que cela allait permettre de renforcer l’efficacité de l’antidépresseur.

Très vite, je me suis plainte car je me sentais dans un état bien pire :  sans aucune envie, apathique, couchée quasiment toute la journée, ne faisant rien de mon temps (aucune lecture, aucune écriture). Je n’avais envie de rien et passais mes journées alitée à entendre (plus qu’écouter) France Culture sur un petit poste de radio. Je n’étais plus autonome... et me sentais incapable de rentrer chez moi ! Mon état s’est donc dégradé à Sainte-Anne.

Mes amis, ma famille ne me reconnaissaient plus : J’étais vraiment devenue une autre Alessia : un vrai légume !


En avez-vous parlé aux psychiatres ?

Les psychiatres en général et en particulier à Sainte Anne ne supportent pas que le malade s’interroge sur le bien-fondé de la prise d’un médicament. Ils n’acceptent que les patients complètement soumis ! Comme je me plaignais toujours et encore de ce traitement, les médecins m’ont répondu que les médicaments ne feraient effet qu’au bout de plusieurs semaines : C’est là que j’ai compris que mon séjour initialement prévu pour deux semaines allait s’éterniser. De fait, je suis restée à sainte Anne plus de six semaines.

J’ai commencé à perdre confiance en ces médecins car les entretiens devenaient de plus en plus « étranges ». En effet, je voyais une équipe de quatre à cinq personnes, une à deux fois par semaine. A chaque fois, les médecins étaient différents. Mais ce qui m’ennuyait étaient que les médecins déformaient mes propos. Ceux-ci n’étaient pas remis dans leur contexte, étaient pris au pied de la lettre !


Par exemple ?

Leurs questions étaient désarmantes : Je ne savais pas quoi répondre. J’ai eu le malheur de mentionner, une fois, une chose complètement anodine en disant que j’entendais parfois mes voisins dans l’escalier  et qu’un, en particulier, faisait du bruit et refusait de faire attention, malgré ma demande... Ce sujet est ressorti à chaque entretien et les médecins pensaient que je m’imaginais ces pas, ces bruits. J’avais beau leur dire que c’était factuel : rien n’y faisait !

Une autre fois, j’ai dit que je n’accordais pas d’importance aux ragots que me rapportait un collègue au travail : Les médecins ont transformé cela : Vous vous en méfiez donc ! Et cela a abouti à des délires de persécution que je subirais !!!!!


Ils se sont donc trompés sur votre cas ?

Ces médecins à Sainte Anne n’ont pas d’empathie vis à vis des malades. Leur écoute est partiale, manque de bienveillance. Ils sont constamment à l'affût de signes et de bizarreries. Et, ce qui est grave, est qu’ils ont tendance à en voir partout. Ils élaboraient et fantasmaient donc sur mes propos en les déformant et en tiraient des conclusions aberrantes (persécution, méfiance, hallucinations, délires...)

Je n’osais plus dire quoi que ce soit, sachant que de toutes les façons ce que je dirais se retournerait contre moi ! Les médecins à Sainte-Anne ont finalement changé de molécules mais ont conservé la base : antidépresseur et neuroleptique.


Quand êtes-vous sortie de l’hôpital ?

Je suis sortie de Sainte Anne début septembre et j’ai repris mes consultations chez le docteur X, qui était passionné par les médicaments et leurs effets. C’est donc avec plaisir qu’il a changé le traitement de Sainte Anne.

En novembre 2014, il a arrêté la prescription d’antidépresseurs mais a poursuivi les neuroleptiques !!!! Il a donc constaté une amélioration au niveau de la dépression. J’ai demandé pourquoi il continuait les neuroleptiques : je n’ai jamais eu de réponse précise. Le docteur X a changé de famille de neuroleptiques à de nombreuses reprises car je n’étais pas bien. Je ne supportais pas ces médicaments et demeurais un légume, incapable d’entreprendre quoi que ce soit, et évidemment dans l’incapacité de travailler !


A-t-il changé de médicament ?

En juin 2015, le docteur X décide de me mettre sous Clozapine (aussi appelé Léponex) et me fait prendre rdv à sainte Anne puisque ce médicament, absolument pas anodin ne peut être mis en place que dans un hôpital où est remis un carnet de suivi puisque des examens sanguins doivent être faits toutes les semaines pendant trois mois, puis ensuite une fois par mois.

Je reporte ce que dit Doctissimo sur ce neuroleptique atypique : "LEPONEX est indiqué chez les patients schizophrènes résistants au traitement et chez les patients schizophrènes qui présentent avec les autres agents antipsychotiques, y compris les antipsychotiques atypiques, des effets indésirables neurologiques sévères, impossibles à corriger..."

Avant de me rendre à Sainte-Anne, on me diagnostique fin juin 2015, lors d’un contrôle annuel, un cancer au sein. C’est donc bien anxieuse et loin du Léponex et de tous ses effets indésirables que je vois donc un des médecins de Sainte-Anne que j’avais rencontré lors de mon séjour.


Quelle a été sa réaction ?

Le médecin de sainte Anne ne bronche pas sur la mise en place du Léponex. Je ne sais plus comment j’ai eu la présence d’esprit de lui demander d’avoir accès à mon dossier médical. Je vois alors le médecin devenir très très embarrassé !! Il s’agit d’un brouillon, vous n’allez rien comprendre tant il y a de jargons.

J’insiste alors d’autant plus ! Je veux savoir ce qu’il y a dans ce dossier. Le médecin ne pouvait pas me le refuser. Il a alors imprimé le dossier et m’a dit de lui poser toutes les questions que je souhaitais : C’est alors que j’ai découvert, complètement effarée, le diagnostic sec et froid à la fin du compte-rendu : « schizophrénie » Jamais, oui jamais, ni les médecins de Sainte Anne, ni le docteur X ne m’avaient parlé de schizophrénie !


Comment avez-vous réagi ?

J’étais anéantie car autant je reconnais avoir été dépressive, autant je ne comprenais pas ce diagnostic de schizophrénie ! Le médecin de Sainte Anne ne m’a pas beaucoup éclairée sur cette schizophrénie et a cherché à minimiser le diagnostic. J’avoue que mon esprit était ailleurs, tant j’étais dévastée par ce cancer. Je suis partie doublement anéantie, en rangeant ce diagnostic de Schizophrénie dans un coin de ma tête, décidant de me concentrer sur le cancer qui était prioritaire. J’ai donc pris le Léponex !

Fin 2015, mon cancer est déclaré guéri. Je décide donc de rouvrir le dossier « Schizophrénie ».

Une amie m'a alors suggéré de me rendre dans un centre expert fondaMental spécialisé en schizophrénie et qui rend des diagnostics INDÉPENDANTS.


Le diagnostic a-t-il été plus précis ?

Les premiers rendez-vous tout début 2016 se sont vraiment bien passés : cela semblait prendre une bonne tournure... Les médecins que j'ai rencontrés m'écoutaient et semblaient abonder dans mon sens : aucun signe de schizophrénie ! Et puis, au dernier rdv (avant l’entretien de restitution), ils m'ont dit, étrangement, manquer d'éléments. Ils sont rentrés en contact avec les médecins de Sainte- Anne ainsi que le psychiatre X et ont réussi à récupérer mon ancien dossier du Kremlin Bicêtre.

Leur diagnostic m'a été annoncé en février 2016 par le chef de service lui-même : Il a validé le diagnostic de Sainte Anne et m'a confirmée schizophrène. Il a également validé la prise de neuroleptique : le Léponex ! J'avoue que les bras m'en sont tombés.

J'étais furieuse car il a avancé des arguments insensés et pauvres. Pour confirmer la schizophrénie, il m'a évoqué par exemple le fait que j'avais mentionné en 1997, à l'hôpital du Kremlin Bicêtre, que pour préparer un voyage en Chine, j'avais décidé de réduire mon alimentation, car je n'aimais pas la nourriture chinoise !! Je ne pouvais tout de même pas emmener de la nourriture française dans mon sac à dos pour un mois !! Qu’aurait-il donc fallu que je fasse ? En quoi cela est-il de la schizophrénie ? Pas de réponse de leur part !

J'ai fait part au chef de service de mon profond désaccord avec son diagnostic, en disant que si j'avais bien fait des dépressions, je n'étais absolument pas schizophrène.


Ce chef de service vous a-t-il entendu ?

Cela a été un dialogue de sourds et au bout d'une heure, il m'a fait comprendre que l'entretien avait déjà trop duré et qu'il fallait que j'accepte le diagnostic. Il m'a dit que je serai recontactée dans un an pour faire le point sur l'évolution de ma santé mentale. Je n'ai plus jamais entendu parler d'eux.

Le psychiatre qui me suivait en ville, lui, a été ravi du diagnostic du centre expert. Il a tenté de me rassurer en me disant qu'il y avait plein de formes de schizophrénie et qu'il fallait que je n'ai pas peur de ce diagnostic. Il m'a également dit que le Léponex produisait ses meilleurs effets, quand on le prenait sur la plus longue durée possible. J'ai demandé plusieurs fois au médecin d'arrêter ce médicament. Il m'a prédit une catastrophe si jamais je stoppais la prise du Léponex.

Le médecin a donc continué à me prescrire le Léponex. J'ai eu quasiment tous les effets secondaires indésirables de ce médicament (prise de plus de 15 kg sans avoir modifié mon alimentation, constipation sévère, accélération du rythme cardiaque : 140 au repos, d'où une prise de béta bloquants début 2017). Un vrai bonheur pour l’industrie pharmaceutique !

Bref, ces médicaments n'ont eu aucun effet bénéfique sur moi : Au contraire, ils m'ont fait perdre toute ma vivacité d'esprit, tout mon enthousiasme, toute mon énergie. J'ai été un vrai légume pendant trois ans.


Que s’est-il passé ensuite ?

Au mois de mars 2017, je suis partie en vacances au Japon et j'ai décidé, contre l'avis de tous, d'arrêter ce médicament, à l’occasion de ce voyage. J'ai, bien sûr, arrêté progressivement. J'ai annulé mon RDV chez le psychiatre X, chez qui je n’ai jamais plus remis les pieds.

J'ai arrêté totalement le Léponex courant mai et dès juin 2017, j’ai commencé à revivre, je suis redevenue moi-même. J’ai retrouvé ma créativité, ma vivacité d’esprit, toutes mes capacités intellectuelles et sociales au travail et dans mon quotidien, dans ma vie personnelle.  Je suis enfin sortie de ce mauvais pas, TOUTE SEULE.

Néanmoins, cela m'ennuie vraiment de ne pas avoir réussi à faire invalider ce diagnostic de schizophrénie qui traîne dans les dossiers de Sainte-Anne, chez ce médecin X, et du centre expert fondaMental !

J’ai vécu mon expérience au centre expert fondamental « Schizophrénie », comme un échec complet. J’ai été profondément choquée par leur manque d’INDEPENDANCE (dont pourtant ils se targuent et qu’ils mettent en avant !). La faiblesse des arguments avancés par le chef de clinique pour confirmer une schizophrénie me laisse vraiment perplexe sur ce médecin.


Vous parlez de trois ans de vie gâchée ?

Je suis désolée d’en arriver à une conclusion aussi sévère... Mais, selon moi, ma prise en charge a été catastrophique et j'en veux aux trois structures : le psychiatre X, Sainte Anne et le centre expert fondaMental.

Je considère qu'ils ont chacun une part de responsabilité pour avoir gâché plus 3 ans de ma vie : de mars 2014 à juin 2017 : Sainte Anne pour le diagnostic aberrant, l’introduction de neuroleptique, le manque d’écoute et la déformation de mes propos et enfin de m’avoir caché leur diagnostic ! Le psychiatre X, pour s'être aligné sur sainte Anne après mon hospitalisation (avant, il ne me prescrivait que des antidépresseurs), sans se poser la moindre question et avoir introduit le Léponex, pris pendant quasiment deux ans ! Lui aussi ne m’a jamais parlé du diagnostic de schizophrénie ! Et enfin le centre expert fondamental pour avoir changé d'avis, avoir émis un avis NON indépendant et s'être aligné sur sainte Anne et le psychiatre X, en validant de surcroît la prise du Léponex !

J’estime qu’il s’agit de trois structures incompétentes qui, de surcroît, se soutiennent et me font détester les psychiatres dont le corporatisme est vraiment dangereux !

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